Une enfance tumultueuse à Saint-Louis
C’est à Saint-Louis du Sénégal, le 22 septembre 1897, que naît Amadou M’Barrick Fall, futur Battling Siki. Fils d’Oulimata et Assane Fall, il grandit dans cette ville portuaire où il développe un caractère audacieux et une grande détermination. Comme beaucoup d’enfants de sa génération, il plonge dans les eaux du fleuve Sénégal pour récupérer les pièces jetées par les passagers des bateaux. C’est dans ces gestes précoces que se dessinent les prémices de son courage et de sa résilience.
À l’âge de 10 ans, son destin bascule lorsqu’il quitte Saint-Louis pour l’Europe. L’histoire raconte qu’une artiste néerlandaise, séduite par son énergie et son sourire, l’embarque avec elle. Mais arrivé à Marseille, il est abandonné. Seul et livré à lui-même, le jeune garçon découvre les rudesses de la vie dans une grande ville étrangère.
Les premiers pas dans la boxe
Amadou, devenu errant, apprend à se défendre pour survivre dans la rue. Cette capacité à utiliser ses poings attire l’attention d’un ancien boxeur, qui décide de le prendre sous son aile. C’est ainsi qu’il devient Battling Siki, un surnom qui illustre son tempérament combatif. À seulement 15 ans, il débute dans la boxe professionnelle sur les rings du sud de la France.
La Première Guerre mondiale interrompt sa carrière naissante. Enrôlé dans les troupes coloniales, il traverse les champs de bataille et s’illustre par son courage, recevant la Croix de Guerre et la Médaille Militaire. À son retour, Siki reprend la boxe avec une détermination renouvelée.
L’ascension fulgurante d’un champion
De 1920 à 1922, Battling Siki enchaîne les victoires. Sa puissance, sa technique et sa fougue impressionnent les amateurs de boxe en France, en Belgique et aux Pays-Bas. Après avoir défait les meilleurs boxeurs européens, il devient le challenger principal du champion du monde des poids mi-lourds, Georges Carpentier.
Le 24 septembre 1922, au Stade Buffalo de Paris, le combat légendaire a lieu. Les premiers rounds montrent un Siki passif, ce qui alimente les rumeurs d’un arrangement. Mais dès le troisième round, il se transforme en une force implacable. À la surprise générale, il terrasse Carpentier au 6ᵉ round, devenant ainsi le premier Africain champion du monde de boxe anglaise.
Cependant, son triomphe est entaché par des controverses. La Fédération française de boxe, réfractaire à ce champion hors normes, cherche à limiter son ascension. En novembre 1922, une altercation avec un arbitre lui vaut une suspension et la perte de ses titres nationaux.
Déclin et tragédie aux États-Unis
En 1923, Battling Siki perd son titre mondial face à l’Irlandais Mike McTigue dans des conditions controversées à Dublin. Son retour en France est difficile. Rejeté par les cercles sportifs européens, il part aux États-Unis avec l’espoir de relancer sa carrière et d’affronter Jack Dempsey.
Malheureusement, il y découvre un environnement hostile, marqué par le racisme et les manipulations mafieuses dans la boxe. Fidèle à ses principes, Siki refuse de se plier aux combats truqués, ce qui lui coûte cher. Il est marginalisé et enchaîne les défaites.
Le 15 décembre 1925, à New York, Battling Siki est retrouvé mort, abattu de deux balles dans le dos. Les circonstances de son assassinat restent floues, mais beaucoup y voient les conséquences de son refus d’adhérer au système corrompu de la boxe américaine.
” Battling Siki, le premier Africain à décrocher le titre de Champion du Monde de Boxe, a surmonté une enfance tumultueuse à Saint-Louis pour devenir une légende, marquant l’histoire du sport et brisant les barrières raciales de son époque. “
Un héritage impérissable
Battling Siki repose désormais à Saint-Louis, sa ville natale, où sa dépouille a été rapatriée en 1993. Malgré une vie marquée par les défis et les tragédies, son parcours inspire encore aujourd’hui. Premier Africain champion du monde de boxe anglaise, il reste un symbole de courage, de ténacité et de résistance face à l’adversité.
Sa mémoire continue d’être célébrée à travers des plaques commémoratives et des récits qui rappellent l’éclat de son étoile, même éphémère, dans l’histoire du sport mondial.